Starter Pack : overdose, fin des graphistes, empreinte carbone… On fait le point.

C’est la tendance qui explose en ce moment sur les réseaux sociaux : se représenter sous forme de « Starter Pack », une sorte de pack de démarrage à son image. Pour obtenir ce visuel, on passe par ChatGPT, en renseignant son prénom, parfois son nom, une courte description et quelques mots-clés ou images.

En quelques minutes, l’IA crée l’image de cette figurine, souvent présentée sous blister, accompagnée d’accessoires qui racontent un peu de cette personne. Ce qui semble anodin et ludique repose pourtant sur des fermes de serveurs réparties aux quatre coins du monde, capables de générer ces images en masse.

Starter Pack

Une mode qui prend de la place… et consomme beaucoup !

Ce phénomène arrive dans la foulée des générateurs de visuels façon studio Ghibli, eux aussi viraux récemment. À tel point que ChatGPT a temporairement limité son utilisation, afin de préserver ses infrastructures et de mieux encadrer les questions liées aux droits d’auteur.

Car ces images générées ne sont pas sans conséquences. Le ministère de la Transition écologique rappelle que l’intelligence artificielle, si elle apporte des solutions et des services, consomme énormément de ressources : énergie, eau, métaux et infrastructures (serveurs, data centers, réseaux…).

D’après une étude de l’université de Pennsylvanie, créer 1 000 images via un puissant modèle d’IA produit autant de CO₂ que parcourir 6,6 kilomètres avec une voiture essence moyenne. Pire encore : générer une seule image utilise autant d’électricité que de recharger un smartphone. Ces chiffres varient selon les modèles et la taille de l’image, mais le constat reste préoccupant.

système de refroidissement chatgpt
Refroidissement des serveurs ChatGPT

Des chiffres qui font réfléchir :

L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) prévoit que la consommation électrique liée à l’IA sera multipliée par dix d’ici 2026. Les data centers, déjà responsables de 4 % de la consommation énergétique mondiale, verront donc leur part grimper.

Autre problème : le refroidissement de ces immenses centres de calcul. Ils doivent être constamment refroidis, sous peine de surchauffe ou d’incident. Pour cela, on utilise de l’eau glacée qui circule dans des échangeurs de chaleur près des serveurs. Plus il y a de demandes d’images, plus ces infrastructures réclament de l’eau, sans même parler de l’énergie nécessaire pour produire cette eau glacée.

Des études estiment qu’une seule image générée par IA nécessite entre 1,8 et 12 litres d’eau. Pour donner un ordre d’idée, le développement et l’entraînement de ChatGPT version 3 ont exigé près de 700 000 litres d’eau. Et selon les projections de l’OCDE, l’intelligence artificielle pourrait consommer jusqu’à 6,6 milliards de mètres cubes d’eau d’ici 2027.

Un « outil formidable » mais…

« On m’a envoyé mon Starter Pack ! » Thomas Pesquet a lancé un immense débat sur 𝕏 , l’astronaute suivi par 1,4 millons d’abonnés, a glissé une petite mise en garde : « Derrière la magie, il y a une réalité qu’on oublie souvent de regarder : le coût environnemental de ces technologies ».

Mais il précise : « Il ne s’agit pas de tout refuser en bloc mais il est essentiel d’intégrer l’éducation à l’impact environnemental du numérique dans nos usages ». 

Le Français a déclenché de vives réactions, certains internautes pointant l’empreinte carbone de ses séjours à bord de la Station spatiale internationale, en réponse à sa prise de position.

france-travail

Des graphistes menacés ?

Autre débat qui agite les réseaux et le monde créatif : ces starter packs signeraient-ils la fin du métier de graphiste ? Beaucoup s’en inquiètent. Il est vrai que pour une image humoristique ou un contenu rapide destiné aux réseaux sociaux, ces générateurs IA suffisent souvent. Mais la vraie création visuelle, celle qui raconte une histoire, qui porte un message et qui construit l’image d’une marque ou d’une institution, demande bien plus que quelques clics et des mots-clés.

Un graphiste, c’est avant tout un cerveau et un œil humain. C’est quelqu’un qui comprend un contexte, un public, des enjeux. Qui sait traduire une idée en image, trouver le ton juste, respecter une identité visuelle, équilibrer un visuel pour qu’il fonctionne aussi bien sur un panneau publicitaire que sur une carte de visite. C’est un métier de réflexion, d’analyse et de créativité humaine.

Et il faut bien l’admettre : les images générées par IA, aussi bluffantes soient-elles au premier coup d’œil, sont souvent bourrées d’incohérences et de petits défauts. Des objets flottants, des doigts difformes, des proportions bancales, des éléments sans logique… Et c’est une véritable galère lorsqu’il s’agit de faire retoucher quelque chose de précis. Demander à l’IA de corriger un détail ou de déplacer un élément peut complètement modifier l’ensemble de l’image, car elle recrée une scène entière à partir de zéro à chaque génération.

C’est ici que le graphiste reste irremplaçable : il peut ajuster, peaufiner, corriger et adapter sans tout refaire. Il maîtrise ses outils et peut répondre précisément à une demande, en tenant compte des contraintes et des attentes.

Finalement, les graphistes ne seront pas remplacés. Ou plutôt : seuls ceux qui refuseront d’intégrer ces nouveaux outils dans leur travail risquent de se faire dépasser. Car l’intelligence artificielle peut être un allié précieux, un assistant pour générer des idées, gagner du temps ou tester des pistes. Mais elle restera un outil, que seuls des créatifs expérimentés et humains sauront maîtriser et utiliser intelligemment, au service de projets sérieux et durables.

Le métier de graphiste a toujours su s’adapter aux révolutions technologiques, et cette tendance ne fait pas exception. Les effets de mode passent, la qualité et la créativité restent.